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Au fond du PNNK

John Rose et Dimitri Dagorne nous présentent les résultats d’un récent périple dans le Niokolo-Koba, le dernier d’une série d’inventaires menés par un petit groupe de passionnés du parc. Merci à eux!

 

Le Parc National du Niokolo-Koba (PNNK) est une aire protégée de 913 000 hectares, retranchée au sud-est du Sénégal à la frontière de la Guinée. Depuis sa création en 1954 il fut le théâtre de nombreux tourments : braconnage, invasion de plantes exotiques, exploitation destructrice des ressources naturelles, tensions avec les habitants expulsés. Mais les efforts accrus de conservation depuis plusieurs années semblent avoir redonné un souffle de vie à ce qui est à présent un des rares grands sanctuaires de biodiversité d’Afrique de l’Ouest.

Pendant cinq ans (2012-2017) l’association française COMETE International (dissoute le 27/1/18), en se coordonnant avec d’autres organismes d’appui comme l’Association des Naturalistes des Yvelines (ANY), le Centre Ornithologique Île-de-France (ex-CORIF, absorbé par la LPO), l’African Bird Club, l’association sénégalaise NCD, et l’UNESCO, a soutenu les efforts des communautés locales pour la valorisation du parc et le développement durable des zones alentour. C’est avec la coopérative des guides du Parc National du Niokolo-Koba (GIE NIOKOLO) qu’ont été ainsi menées une quinzaine d’inventaires ornithologiques avec la collaboration des autorités du parc (Direction des Parcs Nationaux) et une demi-douzaine de voyages touristiques équitables, activités qui relevaient au total environ 4 000 observations de 259 espèces d’oiseaux dans la partie centrale “touristique” du PNNK et ses proches alentours.

Le but principal du voyage actuel, parrainé sur le plan scientifique par l’ANY, était de prospecter les zones du PNNK pas encore explorées dans le cadre de ce projet. Il a été planifié par deux membres de l’équipe scientifique du projet (Dimitri et John) et rejoint par un troisième naturaliste amateur, Jean-Jacques Pailler. Les zones ciblées dans l’est, le sud et l’ouest du parc ne sont accessibles qu’en fin de saison sèche (avril jusqu’à mi-juin) quand les gués sur le fleuve Gambie sont navigables, et nous avons visé la période tardive juste au début des pluies pour éviter le plus fort de la canicule, et pour pouvoir observer des migrateurs intra-africains venant des forêts guinéennes et équatoriales.

Itinéraire Niokolo-Koba

 

Arrivés à l’aéroport de Dakar dans la soirée du 31 mai 2018, nous nous faisons conduire le lendemain dans notre pickup 4×4 à Dialacoto, grand village chef-lieu de la commune de ce nom situé à 480 km de Dakar et à une dizaine de kilomètres de l’entrée principale du PNNK. Le lendemain nous expérimentons, en compagnie de neuf guides du GIE NIOKOLO, un nouveau circuit ornithologique pédestre dans la forêt de Diambour juste au nord de Dialacoto (carte du circuit ici). La savane boisée, bien que proche des activités humaines, offre un sentiment d’immersion dans une nature isolée. Paysages métamorphosés par les saisons, à cette période sèche nous observerons un total de 37 espèces d’oiseaux dont le Bucorve d’Abyssinie, l’Amadine cou-coupé, un groupe d’Hirondelles à ventre roux, et un vol de 61 Pélicans blancs se dirigeant vers le nord (probablement vers le Parc National des Oiseaux de Djoudj qui est leur principal lieu de reproduction) (Abyssinian Ground Hornbill, Cut-throat, Rufous-chested Swallow, Great White Pelican). Ce circuit fait dorénavant partie de l’offre de tourisme ornithologique des guides ainsi familiarisés.

Après une nuit tranquille passée au campement Chez Ibrahima à la frontière du parc, nous pénétrons enfin les terres du PNNK, accompagnés de notre guide du GIE Banna Kanté et du lieutenant Assane Fall, mis à disposition par la Direction des Parcs Nationaux au vu du caractère scientifique de notre mission. Arrivés à Simenti sur le fleuve Gambie, nous étions contents de voir que l’hôtel, seul lieu d’hébergement confortable à l’intérieur du parc avant sa fermeture deux ans auparavant, était en train d’être remis en état pour réouverture pour la prochaine saison touristique (la saison sèche, de décembre à mai). Le tableau qui se présente à nous à la mare de Simenti adjacente est révélateur d’une saison 2017/18 particulièrement aride. Ce plan d’eau peu profond, qui accueille normalement un cortège d’échassiers et de limicoles pataugeant entre les crocodiles, était réduit à quelques pièces d’eau et bains de boue pour phacochères. Nous terminerons la journée au Campement du Lion géré par le GIE, où les murmures de la faune nocturne berceront notre sommeil.

Dès l’aube de notre deuxième jour dans le parc, installés sur un rocher en bord du fleuve Gambie, nous accompagnerons l’éveil de la savane. A quelques mètres de nous les couleurs encore ternes d’une Rhynchée peinte (Greater Painted-Snipe) s’illuminent doucement sous les premières lueurs de la journée. Il est l’heure de poursuivre nos inventaires, et confortablement installés dans la benne du 4×4, nous traversons le Gambie au Gué de Damantan pour atteindre pour la première fois la moitié sud du PNNK. Notre méthode d’inventaire est de rouler à moins de 15 km/h en nous arrêtant le temps nécessaire d’identifier chaque oiseau rencontré. Nous saisissons ainsi les données géolocalisées sur le terrain, au moyen des applis smartphone eBird pour toutes les espèces et celle de l’observatoire participatif African Raptor DataBank pour les rapaces.

Notre premier inventaire matinal de 32 km, sur la piste entre le Gué de Damantan et Barka Bandiel, était ponctué par un arrêt au mausolée d’un imam vénéré à Damantan, ce village évacué lors d’un agrandissement du parc qui reste toujours un important site de pèlerinage. Pour l’inventaire suivant, nous suivions sur 30 km la piste jusqu’à Oubadji, avant que nous soyons obligés d’atteindre en hâte au crépuscule ce dernier village à la frontière extérieure du Parc. Le campement communautaire, où nous avons passé la nuit, est aussi rudimentaire dans son confort que son cadre est merveilleux. Le petit déjeuner en plein air du lendemain nous offrira un spectacle matinal de nombreux oiseaux dont le Coucou de Klaas, le Cubla de Gambie, et le Touraco violet (Klaas’s Cuckoo, Northern Puffback, Violet Turaco).

Violet Turaco Touraco violet (Dimitri Dagorne)

Violet Turaco / Touraco violet (© D. Dagorne)

Peu après avoir quitté Oubadji, nous observons notre première nouvelle espèce d’oiseau pour le PNNK (par rapport aux inventaires précédents), un choucador (“merle métallique”) perché au sommet d’un petit arbre : un Choucador de Swainson.

Lesser Blue-eared Starling Choucador de Swainson (Dimitri Dagorne)

Lesser Blue-eared Glossy Starling / Choucador de Swainson (© D. Dagorne)

Nous poursuivons en traversant de nouveau le Gambie au Gué de Malapa, qui n’est en vérité qu’une traversée non balisée du très large lit desséché et rocailleux du fleuve. Puis nous suivons vers l’est la rive droite du fleuve qui forme la frontière sud du parc. C’est alors que nous ferons une observation très rare de trois Amarantes de Kulikoro, oiseau réputé jusqu’à très récemment d’être absent du PNNK. La peine pour la traversée et la distance nous séparant de notre prochain campement nous contraignent à arrêter notre inventaire après 66 km de piste très difficiles et à finir le trajet de nuit ; nous bivouaquerons au plateau du Mont Assirik à la station de recherche sur les chimpanzés, grâce à une autorisation spéciale des autorités du parc.

Mali Firefinch Amarante de Kulikoro (Dimitri Dagorne)

Mali Firefinch / Amarante de Kulikoro (© D. Dagorne)

Nous consacrons notre quatrième jour dans le PNNK à explorer à pied les abords du Mont Assirik, la seule zone où les visiteurs sont autorisés à se déplacer à pied. Nous partirons à l’ascension du sommet, point culminant du parc à 311 mètres. Perdus dans nos comptes par les nombreuses nuées de passereaux multi-spécifiques s’enchaînant aux sommets des arbres, nous observons 11 Loriots dorés (African Golden Oriole) dont un groupe de sept en vol bas. Autre observation notable : quatre Pluviers de Forbes déambulant autour d’une petite pièce d’eau. Sur le chemin du retour, juste avant d’arriver au campement, un tourbillon de vent est soudain tombé sur nous, apportant à seulement quelques mètres un jeune Bateleur des savannes.

Forbes' Plover Pluvier de Forbes(Dimitri Dagorne)

Forbes’s Plover / Pluvier de Forbes (© D. Dagorne)

Bateleur (Dimitri Dagorne)

Bateleur (© D. Dagorne)

Après le déjeuner nous descendrons dans la Vallée de Stella légèrement en contrebas du campement pour poursuivre dans un étroit lit de rivière. La forêt galerie est dense, nos observations seront furtives et fragmentaires. Un œil sublimement maquillé, une crête verte et des ailes violettes, Dimitri reconnaît là le Touraco vert (Green Turaco). Une petite gorge d’un jaune éclatant sur un oiseau sombre, il s’agit d’une paire de Bulbuls à gorge claire (Yellow-throated Leaflove). Tous les deux sont des nouvelles espèces pour nous, l’observation du touraco loin de ses territoires de base à l’extérieur du parc est particulièrement significative. Dans les feuilles d’un palmier, un Noircap loriot occupé à la construction de son nid se laisse observer en toute indiscrétion. Posée dans une fourche cachée par un amas de branches, nous apercevons une Tourterelle d’Adamaoua (Adamawa Turtle-Dove).

Oriole Warbler Noircap loriot (Dimitri Dagorne)

Oriole Warbler / Noircap loriot (© D. Dagorne)

Le lendemain matin, Dimitri a pu observer près du campement un Traquet familier, notre cinquième nouvelle espèce qui, bien qu’assez commune dans l’extrême sud-est du pays, n’a été observée auparavant qu’une seule fois dans le parc (par Geoffrey Monchaux en janvier 2018 dans la même zone). Il fallut quitter à regret le Mont Assirik pour retourner au Campement du Lion par une longue route en trois étapes d’inventaire dans le sud du PNNK, très, très sec, et décevante du côté ornitho.

Lors de notre dernière matinée au parc, nous observons aux abords du fleuve Gambie un Martin-pêcheur azuré, assez rare et surtout très discret, et un couple de Grues couronnées (Shining-blue Kingfisher & Black Crowned Crane). Nous prenons la route vers la sortie du PNNK pour nous retrouver au confort à l’hôtel de Wassadou, l’objet d’un récent rapportage dans ce blog. L’hôtel se trouve sur la rive droite du fleuve Gambie, la rive d’en face faisant partie du PNNK. Embarqués sur le fleuve le lendemain matin dans la petite pirogue à moteur de l’hôtel, nous observons de nouveau la Tourterelle d’Adamaoua et le Martin-pêcheur azuré, puis nous voyons perchée côté PNNK une magnifique Chouette-pêcheuse de Pel, notre sixième nouvelle espèce. Revenus à terre, nous observons une seconde chouette cachée sur la rive de la rivière Niériko qui se jette dans le Gambie au niveau de l’hôtel.

Chouette-pêcheuse de Pel (Dimitri Dagorne)

Pel’s Fishing Owl / Chouette-pêcheuse de Pel (© D. Dagorne)

Dans le PNNK et ses proches alentours, nous avons observé 148 espèces d’oiseaux dont six nouvelles pour notre projet, soit un total de 265 espèces sur les quelques 360 signalées dans la littérature scientifique et archives d’observations (y compris les visiteurs passagers ou égarés). Une publication scientifique présentant les résultats du projet est en cours de préparation.

Nous partons en fin de matinée du 9 juin pour la Réserve Naturelle Communautaire de Boundou, située à environ 115 km au nord-est de Wassadou, que nous explorons pendant deux jours avant de reprendre la route pour l’aéroport via la Réserve Naturelle de Somone. Au total, nous aurons admiré lors de ce riche et intense voyage 193 espèces d’oiseaux, 21 de mammifères et plusieurs reptiles et invertébrés intéressants (voir les listes présentées dans le rapport complet disponible ici). Vos questions ou commentaires peuvent être postés ci-dessous ou adressés à John Rose.

 

Shining-blue Kingfisher Martin-pêcheur azuré (Dimitri Dagorne)

Shining-blue Kingfisher / Martin-pêcheur azuré, Camp du Lion (© D. Dagorne)

 

 

Les oiseaux de Wassadou

Ah, Wassadou!! On a déjà parlé à quelques reprises du campement de Wassadou, site maintenant bien établi sur le circuit ornitho sénégalais, notamment ici et . Après avoir découvert trop brièvement ce coin fabuleux en février dernier, un long weekend en juin a été l’occasion d’y retourner en compagnie de Miguel puis de Gabriel qui nous a rejoint sur place. Que du bonheur! J’avais donc envie de vous présenter un peu plus ce petit coin de paradis et de partager quelques photos prises sur place.

Voici en vrac quelques espèces, à commencer par les rapaces. Il y a ici une incroyable diversité de rapaces diurnes, tous visibles depuis la terrasse naturelle du campement surplombant le fleuve Gambie. Dès le milieu de la matinée, vers 10-11h, il suffit de s’installer sur le promontoire, et le défilé commence: Aigles de Wahlberg, ravisseur et huppardPygargue vocifère, Buse d’AfriqueBusautour des sauterelles, Circaète brun, Autour unibandeEpervier shikra, Balbuzard pêcheur, Bateleur, bien sur les Gymnogènes et aussi cet autre rapace unique en son genre, le Vautour palmiste.

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Palm-nut Vulture / Vautour palmiste

Ainsi en juin nous avons pu observer pas moins de 14 rapaces différents. Sur les quelques 227 espèces contactées ces dernières années à Wassadou et dans les environs immédiats du campement, il y a pas moins de 28 rapaces, plus 4 faucons – impressionnant! Il y a d’ailleurs toujours de quoi voir lorsqu’on scrute le ciel: avec un peu de chance, on verra la Cigogne épiscopale ou un Jabiru, et parmi les nombreux martinets se cachent peut-etre quelques Martinets marbrés, espèce connue dans le pays uniquement du PNNK et dont nous avons pu voir plusieurs individus en juin.

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Wahlberg’s Eagle / Aigle de Wahlberg

Le Pluvian fluviatile est sans doute l’une des stars du site, et de plus il est généralement facile à voir ici, en train de parcourir les bancs de sable des abords du fleuve. J’imagine qu’au plus fort de la saison des pluies (août/septembre-octobre), lorsque la Gambie déborde parfois largement de ses berges pour inonder le campement même, ces oiseaux sont alors absents mais sinon le reste de l’année ils semblent bien fidèles au poste. Idem d’ailleurs pour le Grébifoulque, cet autre oiseau spectaculaire qu’on aura le plaisir de voir à Wassadou.

Pluvian fluviatile - A Barbalat Feb 2018

Egyptian Plover / Pluvian fluviatile (A. Barbalat)

Autre spécialité locale, le Vanneau à tête blanche est plus difficile à voir et il faut parfois attendre un peu avant de le voir surgir de nulle part, lui aussi fréquentant les berges et zones exondés du fleuve. Comme le Pluvian, ce limicole s’observera le plus facilement lors d’une sortie en pirogue.

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White-crowned Lapwing / Vanneau à tête blanche

Les martin-pêcheurs sont particulièrement bien représentés à Wassadou, toutes les espèces régulières du Sénégal peuvent être vues ici. Le Martin-chasseur à poitrine bleue est commun, lançant son chant étonnant à longueur de journée. Toujours discret et imprévisible, le Martin-pêcheur azuré a été observé à plusieurs reprises ces dernières années et est à rechercher dans l’ombrage des buissons surpblombant la rivière aux alentours du campement, ou s’observera furtivement lors d’un déplacement d’une rive à une autre. Les Guêpiers à gorge rouge nichent dans les berges, et en saison sèche il est possible de voir des Guêpiers écarlates survolant la zone, parfois en effectifs impressionnants.

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Blue-breasted Kingfisher / Martin-chasseur à poitrine bleue

On continue avec une espèce phare d’un tout autre registre, la Tourterelle de l’Adamoua. Découverte en Gambie et au Sénégal il y a une trentaine d’années seulement (Baillon 1992), cette tourterelle est relativement facile à trouver lors des sorties en pirogue sur la Gambie, de préférence tôt le matin ou le soir lorsque les oiseaux viennent s’abreuver. Et avec un peu de chance on la croisera dans la ripisylve aux alentours du campement, comme l’oiseau ci-dessous:

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Adamawa Turtle-Dove / Tourterelle de l’Adamoua

Parmi les passereaux les plus remarquables, citons entre autres le Noircap loriot, l’Apalis à gorge jaune, Prinia à ailes rousses, Gobemouche des marais, Gobemouche drongo, Tchitrec bleuHyliote à ventre jauneSouimanga violet, Amarantes pointé et masqué (même celui de Kulikoro a été signalé non loin d’ici). Le Combassou de Wilson et la Veuve togolaise ont tous les deux été rapportés sur eBird. Du côté des hivernants, en février dernier on a eu entre autres le Rossignol philomèle, l’Hypolais obscure, le Phragmite des joncs, et de manière bien moins attendu un Pouillot ibérique chanteur – tous le long du fleuve. C’est là également qu’il faut rechercher la Bergeronnette pie, espèce très répandue en Afrique subsaharienne mais plutôt localisée au Sénégal, qui comme plusieurs autres espèces atteint ici sa limite septentrionale dans le pays.

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African Pied Wagtail / Bergeronnette pie

Des choucadors de toutes sortes font des va-et-vient continus en quête d’eau et de nourriture autour du campement, comme ce Choucador à queue violette photographié en juin dernier.

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Bronze-tailed Starling / Choucador a queue violette

On termine notre tour d’horizon trop rapide avec la fabuleuse Chouette-pêcheuse de Pel, phantome du fleuve qu’on pourra tenter de voir au crépuscule lors d’une sortie en pirogue, parfois à quelques centaines de mètres seulement du campement. En juin dernier, nous entendons un jeune crier chaque soir, et on a la chance de d’abord voir ce qu’on suppose être un adulte (photo d’en-tête), puis plus en aval le jeune vient se poser non loin de nous (photo ci-dessous): ces oiseaux sont présents depuis la fin de l’an dernier au moins et il donc probable qu’ils aient niché dans les environs immédiats du campement. Notons encore que parmi les nocturnes, on pourra entendre le Petit-duc africain, et à la tombée de la nuit il est parfois possible de voir des engoulevents chasser au-dessus de la rivière (à longue queue et à balanciers).

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Pel’s Fishing-Owl / Chouette-pêcheuse de Pel

Difficile de s’arrêter en fait… car comme si tout cela ne suffisait pas encore, il y a encore un autre oiseau tout aussi unique et au statut quasi-mythique au sein de l’avifaune africaine: le Bihoreau à dos blanc! Déja vu furtivement par mes amis genevois en février, il nous a fallu un peu de temps lors de notre visite la plus récente pour comprendre que les grognements et roucoulements parvenant de la végétation dense juste en bas du promontoire, là où se jette un ruisseau dans le fleuve, n’étaient rien d’autre que le cri (ou chant?) de ce héron nocturne si discret et si peu connu au Sénégal. Et dont ce cri n’est pas mentionné dans les guides de terrain (et on l’apprendra plus tard, cette vocalisation n’était pas encore disponible dans les principales banques de données de sons d’oiseaux). Je vous invite donc à découvrir deux enregistrements faits avec mon modeste Olympus LS-12, ici avec les Babouins en arrière-plan. On les attendra à la tombée de la nuit, et effectivement: trois bihoreaux quittent leur cachette en criant pour aller se nourrir au bord de la rivière – on en verra un dans la pénombre juste en face du campement, visiblement en train de pêcher à l’affût depuis une branche au bord de l’eau. Le lendemain au petit matin, les oiseaux ont déjà regagné leur “dortoir”, mais un dérangement (sans doute par des singes) fait décoller un adulte qui part alors vers l’amont. Jean-Francois Blanc et collègues ont d’ailleurs rapporté la présence du Bihoreau à dos blanc plus en aval de l’autre côté du PNNK, à Mako en mars 2016, suggérant – avec raison – que “cette espece discrète pourrait etre sous-détectée le long de la Gambie au Sénégal”. Et tout récemment, Gabriel l’a trouvé au bord de la Falémé dans la réserve du Boundou!

Et puisqu’on parle de nocturnes, voici les Mégadermes à ailes orangées vus en février dernier à deux pas du resto du campement.

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Yellow-winged Bat / Mégaderme à ailes orangées

Wassadou c’est donc bien plus que les oiseaux! Deux Hippopotames ont élu domicile devant le campement, tout comme quelques Crocodiles du Nil. A l’aube et au crépuscule, avec un peu de chance on verra le Guib harnaché, le Céphalophe à flancs roux voire d’autres ongulés venir boire. Les Singes verts sont omniprésents, deux troupes de bruyants Babouins de Guinée rôdent dans la ripisylve et passent la nuit dans les fromagers au bord de l’eau. Le Colobe de Temminck (Piliocolobus (badius) temminckii), taxon classé En Danger par l’UICN, endémique à la sous-région puisqu’il est restreint à la partie occidentale des forêts de la Haute-Guinée: le sud du Sénégal, la Gambie, la Guinée-Bissau et le nord de la Guinée. Au Sénégal, il y aurait “probablement moins de 400-500 individus dans le PN du Delta du Saloum, et probablement moins de 100 dans la population du PNNK et du nord-ouest de Guinée” (IUCN).

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Western Red Colobus / Colobe de Temminck

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Western Red Colobus / Colobe de Temminck

Où observer?

C’est simple: en vous posant sur la terrasse, une bière ou un jus dans la main, les jumelles dans l’autre, le téléscope posé devant la chaise longue. Ou à côté du hamac, c’est selon les envies. On peut donc facilement passer quelques heures ici, mais une ballade dans la brousse environnante permettra de pleinement apprécier la richesse du coin: en suivant le sentier longeant le fleuve en partant vers l’amont du campement, on pourra trouver toute une série d’oiseaux, notamment divers passereaux, et il est possible d’accéder au bord de l’eau à quelques endroits. Et bien sûr, ne pas oublier de prévoir au moins une sortie en pirogue!

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Il faut prévoir un minimum de deux nuits sur place, plus si possible – d’autant plus si on a envie de faire une excursion dans le parc du Niokolo-Koba (où l’on pourra également passer une ou deux nuits, au campement du Lion ou à Simenti).

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Green Monkey / Singe vert

 

Comment rejoindre Wassadou?

Le campement se situe juste en face du Niokolo-Koba (la Gambie fait office de frontière du parc ici), à 2-3 kilomètres du goudron Tambacounda – Kédougou, plus précisément ici. Et contrairement au PNNK, pas besoin de 4×4 pour rejoindre le site! Par contre, il faut bien compter 8 heures de route depuis Dakar. L’établissement dispose d’une dizaine de cases simples mais corrects (ne vous fiez pas à l’apparence du site internet du campement, qui a besoin d’un serieux relooking).

 

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Of lists, listing and listers: how many bird species in Senegal?

I have a bit of a confession to make. I’m a bit of an obsessive lister, always counting and collecting birds, new ones if at all possible. Or rare ones. I have a Life List, a Senegal List, Africa, Western Palearctic, a Technopole list. A list of colour-ring recoveries. And so on. Maybe not as far as keeping year lists or garden lists or self-found lists or lists of birds seen while writing up blog posts, but still I’m pretty much counting species all the time. I won’t go through great lengths to “tick” new birds and I don’t take the whole listing thing too seriously, neither will I keep track of my buck-per-bird expenditure rates (yes, it seems that some birders calculate this), but still… lots of obsessive listing.

I’m sure that some of our readers will recognise this – do we need group therapy? Maybe it’s just human (male?) nature, to be collecting and classifying things. Some of these lists may actually be quite useful especially when covering little-known regions as I sometimes get the chance to do on my work trips (think South Sudan, Somaliland, Burundi…), but for the most part they’re just my own little checklists sitting in an old Access database… time to upgrade, right?

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Baird’s Sandpiper / Bécasseau de Baird, Technopole – Senegal’s second record (and first documented) and a personal lifer

 

Luckily there’s still lots of new species to be counted, we’re not quite done yet – I’ve only seen less than a quarter of the world’s birds, mostly in Africa (ca. 1,370 species, Wilson’s Indigobird a couple of weeks ago near Lac Togo being the most recent addition), so there are still many new ones to discover.

By now, my Senegal list stands at about 495 species, after three and a half years of pretty active birding in the country. But how “good” is 495? How many species have been reliably recorded in Senegal? This may be an easy question, but the answer is certainly not so straightforward. First of all, what taxonomic reference to follow? Depending on which reference one uses, certain subspecies are elevated to species rank while others are not, and with current tendencies to split species it can be hard to keep up with the understandably dynamic nature of bird taxonomy.

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Adamawa Turtle Dove / Tourterelle de l’Adamoua, one of Senegal’s “specials” that can reliably be seen in the south-east

Several years of “service” in the Swiss national rare bird committee and a French regional records committee taught me a bit of discipline in keeping count of records and numbers for rare or scarce species, in ensuring appropriate documentation, in reassessing status of vagrants and scarce migrants, keeping track of changes in taxonomy and advances in identification criteria, and so on. And then there’s the status categories: “A” (species occurs naturally in the wild, seen at least once in modern ornithological history, eg. since 1950), “B” (same as A but not recorded since the cut-off year), “C” (introduced exotic species that have established autonomous breeding populations), “D” (the dreaded uncertain origin category), and finally “E” (escapes). Only species that are in the A, B or C categories are part of a country’s national list. In Senegal, the only established exotic species appears to be House Sparrow (unless Eurasian Collared Dove is also introduced or escaped, though this is far from certain; wild Rock Doves apparently still exist in the Kédougou escarpments).

So, in order to answer our question of the number of species occurring in Senegal, let’s start by identifying an appropriate taxonomic reference. The IOC (International Ornithological Committee) is nowadays usually considered the standard authority, being followed by many countries and authors. The Handbook of the Birds of the World (HBW) is another reference, I guess a bit more progressive than IOC, and was adopted by BirdLife and the IUCN. I won’t go into reviewing the differences between these and other lists such as Howard & Moore or Sibley, though we should mention that the African Bird Club follows IOC which as such should be an obvious choice here. Unfortunately, the ABC is not very good at remaining up-to-date to the extent that the current version dates back to 2010 – and at the time of writing, the page to download country checklists was non functional… The ABC now also has new “Dowsett country lists” which are largely based on the more conservative Howard & Moore taxonomy. More than anyone else, the Dowsetts are of course a major reference in their own right when it comes to African birds, and it would be great to have up-to-date checklists for each country. To make matters more complex, the ABC also links to checklists by their “partner” iGoTerra; unfortunately, their Senegal list is highly unreliable as it contains about a dozen species that have never been recorded in Senegal as well as several obvious missing species… and I assume that it’s the same for other countries. Really surprising (and disappointing) that the ABC endorses these lists. Similarly, other country checklists, e.g. the Avibase list, contain several serious errors and should be avoided. As such, we hope that the Senegal list that we’re making available here will be of use to local and visiting birders alike.

Either way, we settled on the IOC list – the choice of which can of course be debated, but it seems to make sense given that ABC is following it and that there is no proper reference committee for Africa (such as the AERC for Europe, though they’re not quite as authoritative as they ought to be, with many national committees following different standards). Anyway… let’s move on.

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Pel’s Fishing Owl / Chouette pecheuse de Pel – one of the most recent additions to my own Senegal list, and a much anticipated lifer.

 

So, I took the African Bird Club country list for Senegal as a starting point, and updated it as per the latest IOC version. As our regular readers will surely know, quite a few species have been added to the national list in recent years, so these were of course included in the list. Several species on the ABC list are marked as uncertain, since at the time no proper documentation existed, such as Blue-throated Roller and Black-and-white Mannikin. I’ve removed those that seem unlikely, as well as Tropical Boubou which is yet to be confirmed (and I replaced Red-fronted Warbler, which was included in error, by Cricket Warbler). I’ve added Vieillot’s Black Weaver based on the account that Lesson described this species in 1840 based on a specimen from Casamance (it’s on the Gambian list, but not on the ABC list for Senegal). Here again, in the absence of a national or regional rare birds committee, these are personal choices and I’d be happy to revise these if there’s a good case to do so.

Below are the new species seen in the last 12 years, in chronological order. Those  marked with a * were formally documented, typically through publications in the ABC Bulletin or in Malimbus; records with a ° symbol await publication or will be written up shortly:

2018 01 5, 14h38. Doué de Gamadji Saré. © Photo par Frédéric Bacuez, IMG_7122 (3)

One of the Horus Swifts / Martinet horus found in January 2018 at Gamadji-Sare (F. Bacuez)

 

On average, that’s just one or two additions per year – though note how 2012, 2016 as well as 2018, only half-way through, already stand out with no less than three new species. Also note how four out of these 18 records were also new to sub-Saharan Africa or even the African continent as a whole: Western Sandpiper, Short-billed Dowitcher, Black Guillemot, Eyebrowed Thrush. The records of Eurasian Collared Dove and Horus Swift, both possibly/probably breeding, constitute major range extensions in West Africa. The fact that another four of the above records are from the Dindéfélo area is also quite remarkable: it just shows how a previously largely ignored border area harbours several species that just creep into the country. Dakar, being relatively well watched in recent years, also stands out as a national “hotspot”, as is the Gandiol/Langue de Barbarie area to a lesser extent.

Add to this list the Canary Islands endemic Plain Swift, which thanks to geolocators was recently shown to transit through Senegal on its way to the newly discovered wintering grounds in Sierra Leone, Liberia and Guinea (Norton et al. 2018) – a nice example of modern technology solving one of the many remaining mysteries in the field of migration. Eleonora’s Falcon is another species that was confrmed to occur thanks to satellite tracking programs (Gschweng et al. 2008) but that is yet to be seen in natura.

Then there are two special cases, both of hybrids: a Greater x Lesser Spotted Eagle, that was GPS-tracked from its Central European breeding grounds into Mauritania, Senegal and Gambia; neither of the parents have been confirmed from Senegal as “pure” birds, but does this mean that this bird somehow needs to make it to the national list? To a lesser extent, the probable Woodchat x Red-backed Shrike seen last year is also an interesting case since the latter parent species has never been recorded in Senegal, though there are records from nearby Mauritania. Logically, hybrids should not be included on the national list, but I’d be happy to be convinced otherwise (in this specific case though, we cannot be 100% that the second parent of the hybrid shrike was indeed a Red-backed Shrike).

Woodchat x Red-backed Shrike / Pie-grieche a tete rousse x ecorcheur

Presumed Woodchat x Red-backed Shrike / Pie-grieche à tête rousse x écorcheur, Lac Tanma, Aug. 2017

 

So now for the list: with the recent additions, and following the latest IOC taxonomy, we end up with at least 671 species. The full list is available HERE as a handy Google spreadsheet  – of course it’s work in progress and I’d be happy to receive contributions. You’re more than welcome to download the list as an Excel file and use it as a checklist for the country. I did include a small number of species for which there are unconfirmed older records but that are likely to be present; these are marked with a ? in the list, and if confirmed would bring the total to 676 species. One of these is likely extinct in the wild by now: Common Ostrich, marked with an “E” (and Secretarybird probably shares the same fate though could still show up as a wanderer). Vagrants are listed as “V” in the list; for some of these – e.g. Little Gull – it’s not quite clear whether they should be considered as true vagrants or whether they are merely rare migrants that do in fact make it to Senegal on a more or less regular basis.

For those who tend to prefer the HBW/BirdLife taxonomy, the Senegal list should be at least 664 species – quite surprisingly this is quite a few species less than the IOC list, due to several splits that aren’t recognised by HBW (Boyd’s & Barolo Shearwaters are treated as part of Audubon’s Shearwater, White-breasted Cormorant is a ssp. of Great Cormorant, Yellow-billed Kite is rather suprisingly considered conspecific with Black Kite, Barbay Falcon part of Peregrine Falcon, African Reed Warbler a ssp. of Eurasian Reed Warber, and Atlas Flycatcher a ssp. of Pied Flycatcher). The only additional species is Seebohm’s Wheatear which surprisingly is not recognised by IOC, despite it being very distinctive from Northern Wheatear. Other splits do not directly affect the number of species on the Senegal list, though names may differ (e.g. Black-faced Firefinch is now known as Vinaceous Firefinch Lagnosticta vinacea, endemic to West Africa). When I find the time, I’ll also include a link to the HBW country checklist.

There are probably a few other species missing from the list, as not everyone goes through the effort of writing up notes or publishing pictures of potential first records. For instance, what would be the first record of Cinereous Vulture was only just recently uploaded to eBird and while it certainly seems like a credible observation, I’m awaiting further details from the observers. Likewise, there’s only one formally published record of Citrine Wagtail, but I found a reference to another observation that pre-dates the 1999 Technopole bird, which was mentioned along with a succinct (but in my view sufficient) description in the waterbird expedition report by Schepers and colleagues (27.1.97 at Djiffer, Saloum), and found out recently that a British tour operator that regularly visits Senegal has a few records of the species from Nianing. Once again, a real shame that the commercial birding companies rarely contribute to our knowledge of the areas that they visit. Corrections are more than welcome of course.

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Senegal’s first Meadow Pipit / Pipit farlouse (Yene-Tode, 1.1.18)

 

What will be the next species to be added to the country list? One can surely make a few predictions in terms of what species are likely to be added in the future – think various American vagrants with Ring-necked Duck and White-rumped Sandpiper being the most obvious candidates (and why not Wilson’s Phalarope or Solitary Sandpiper, or a Forster’s Tern or maybe even a Stilt Sandpiper), tropical seabirds such as Swinhoe’s Storm Petrel, Fea’s and Black-capped Petrels or Masked Booby, various desert passerines (Dunn’s Lark in particular should be sought for in the far north, White-crowned Wheatear is also a good possibility in winter), songbirds from northern Europe and Siberia such as Richard’s and Olive-backed Pipits or even Little Bunting, all of which have been reported from Mauritania. The lists goes on and on really – lots of potential to find new stuff!

Key areas to search for northern and American vagrants are of course the coastal wetlands, while the northern border regions should be targeted for winter vagrants and desert species. Finding new seabirds will likely require pelagic trips and a decent amount of luck¹ – and it’s likely that seabird monitoring programs that use satellite tracking will turn up some new species in Senegalese waters. For those lucky to go out birding in Casamance, chances are that Turati’s Boubou and Preuss’s Cliff Swallow are already established in a few localities and that they are just waiting to be discovered. Quailfinch Indigobird may well occur but apparently remains to be confirmed. And for those making it to the far south-east, why not search for Rock Pratincole which should occur at least occasionally along the Gambia river (or even along the Falémé), or try for low-density species that occur not too far out in Mali or Guinea of the likes of West African Seedeater and Cabani’s Bunting, and that may well just creep over the border into Senegal.

And then there are of course those species that one may expect the least, such as our Horus Swifts earlier this year – an incredible range extension (if confirmed to be regular) of some 1,600 km at least. Or Damara Tern, known from a single recent record from Mauritania (in 2006, Isenmann & Benmergui 2018). Only time will tell – what’s clear is that there’s still lots to discover.

Now, time to get out there and find new birds. And keep listing.

Thongbird

 

Bram, with useful contributions by Simon and Frédéric – merci à eux!

 

¹ and chum.