Visite à Kolda, Moyenne Casamance
La semaine passée j’ai eu l’occasion de passer quelques jours dans la ville de Kolda, capitale de la région du même nom, pour une visite d’appui à l’un de nos projets. J’en ai bien sûr profité pour observer un peu les oiseaux, essentiellement sur le terrain de l’hôtel Le Firdou où nous étions logés. Situé au bord de la Casamance en bordure sud de la ville, les oiseaux étaient bien entendu au rendez-vous: plus de 90 espèces vues en trois jours, et ce uniquement sur le terrain du Firdou.
Chaque jour apportait d’ailleurs son lot de nouvelles espèces: comme quoi ça paie de revisiter une même zone, même de surface réduite, plusieurs fois de suite. La rivière attire bien sûr bon nombre d’oiseaux (et pas des moindres… voir plus bas!), tout comme le jardin et ses nombreux manguiers et anacardiers. La brousse de l’autre côté de la rivière doit certainement héberger d’autres espèces mais n’était pas vraiment accessible… même si la Casamance est plutôt un ruisseau ici qu’un grand fleuve comme c’est le cas à Ziguinchor, surtout en cette fin de saison sèche –
Par où commencer? Peut-être par cet impressionant Martin-pêcheur géant (Giant Kingfisher), un mâle immature, vu plusieurs fois aux abords de l’eau, tout comme le Martin-pêcheur pie, le bruyant Martin-chasseur à poitrine bleue ainsi qu’un couple de Martin-pêcheurs huppés tout excités (Pied, Blue-breasted and Malachite Kingfishers). C’était d’ailleurs la première fois que j’ai pu entendre et enregistrer le chant de ce dernier, qui comme notre Martin-pêcheur d’Europe ne doit pas se faire entendre très souvent!
Toujours sur le plan d’eau, il y avait tous les jours quelques Cormorans africains (Long-tailed Cormorant), Jacanas à poitrine dorée (African Jacana; probablement trois couples, bien territoriaux!), 2-3 Poules d’eau (Common Moorhen), plusieurs Râles à bec jaune (Black Crake) et même un Chevalier guignette (Common Sandpiper) retardataire ou estivant…
… mais aussi et surtout ce Grébifoulque d’Afrique (African Finfoot), oiseau unique en son genre (literalement!) qui fait partie de ces espèces tant convoitées par les birders. Et dont pour une fois le nom francais un peu barbare décrit bien cette étrange créature: mi-grèbe, mi-rallidé, tout aussi bizarre dans son apparence que dans son comportement. Perso j’ai eu la chance de l’observer au Kenya, en Zambie et au Liberia, et maintenant donc aussi au Sénégal! Je l’ai trouvé deux matinées de suite en train de se nourrir, discret comme tout mais heureusement pas trop farouche. A priori une femelle, voire un mâle immature?
Bien que répandu à travers le continent, Podica senegalensis n’est nulle part commun et en raison de ses moeurs discrètes et un habitat souvent difficile d’accès, on ne trouve pas beaucoup d’infos concernant sa répartition au pays qui a donné lieu à son nom scientifique: les Morel font état d’une petite population sur les rives nord du Lac de Guiers (aujourd’hui disparue il me semble) et de sa présence en Basse-Casamance, et ils mentionnent quelques données de Tambacounda et Kédougou; Sauvage & Rodwell le signalent en plus du Niokolo-Koba et de la rivière Koulountou (limite régions de Kolda et Tambacounda). Le seul site sénégalais qui fournit des observations plus ou moins régulières est le campement de Wassadou sur le fleuve Gambie, escale obligatoire dans le circuit orni-touristique pour les visiteurs en route pour le Niokolo-Koba ou Kédougou (peut-être également Mako plus en amont, au SE du PNNK). Le Grébifoulque est pour l’instant absent de l’atlas de Casamance, bien qu’il soit certainement assez répandu dans cette partie du pays, vu à quel point il est régulièrement contacté en Gambie toute proche.
Bien plus en vue, les ardéidés étaient au rendez-vous même si toujours en effectifs faibles, généralement à l’unité ou par 2-3 individus : Crabier chevelu, Héron noir, Aigrette des récifs, Aigrette intermédiaire, Héron gardeboeufs, Héron strié, pourpré, cendré, Bihoreau gris. (Squacco, Black, Striated, Purple & Grey Herons, Western Reef & Cattle Egrets, Black-crowned Night-Heron). Une Ombrette (Hamerkop) ne fera que passer en vol, le premier soir.
Peu de rapaces sont notés mais c’est peut-être surtout lié au fait que je n’ai observé que les matins tôt et généralement l’heure précédant le coucher du soleil… boulot oblige! Seulement une poignée de Vautours charognards (Hooded Vulture; quel contraste avec la Basse-Casamance!) et une fois deux Gyps vus sans jumelles, probablement des Vautours africains. Aux alentours du lodge, présence de l’Autour sombre (Dark-chanting Goshawk), Autour unibande (Lizard Buzzard), Milan à bec jaune, Pygargue vocifère (entendu un peu en amont), et un adulte de Vautour palmiste, toujours aussi imposant malgré son apparence clownesque. A l’aéroport de Kolda, un Busautour des sauterelles sera la 400e espèce que je vois au Sénégal (eh oui je tiens une liste!!).
D’autres ajouts étaient le Râle perlé (White-spotted Flufftail; entendu un seul matin), les bruyants Touracos violets (Violet Turaco), le Guêpier à gorge rouge (Red-throated Bee-eater), le Prinia à ailes rouges (Red-winged Warbler), la Cisticole chanteuse (Singing Cisticola; encore bien discrète), le Gladiateur de Blanchot (Grey-headed Bushshrike; comme toujours invisible mais très audible!), les sympathiques Chevêchettes perlées (Pearl-spotted Owlet). Egalement une poignée d’espèces vues jusqu’ici à quelques reprises seulement, comme l’Hirondelle fanti (Fanti Saw-wing), toujours aussi élégante. La donnée de Râle perlée est intéressante car il n’y a apparemment que peu d’observations du Sénégal, alors qu’il est régulier en Gambie. Cette quasi-absence d’infos est probablement à mettre en relation avec le fait que l’espèce chanterait surtout en ce moment (mai-juin selon Morel & Morel) et que l’essentiel de l’activité ornithologique a lieu pendant l’hiver nordique lorsque ces flufftails sont soit absents, soit silencieux.
A propos de chant: les nombreux Cossyphes à tete blanche et Merles africains (White-crowned Robin-Chat, African Thrush) et dans une moindre mesure les quelques Bulbuls à gorge claire (Yellow-throated Leaflove) du jardin étaient bien vocaux, tout comme un Coucou africain (African Cuckoo) entendu chanter tous les jours dans la brousse sur la rive gauche. En tout, seize espèces enregistrées dont quelques-unes nouvelles pour ma petite collection sonore, à découvrir sur xeno-canto.
Observations faites du 16 au 19/5/17.
8 responses to “Visite à Kolda, Moyenne Casamance”
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- June 26, 2017 -
- January 13, 2018 -
- February 12, 2019 -
- June 16, 2019 -
Joli reportage ! Je ne connais pas ce coin d’Afrique, mais ça a l’air particulièrement riche ! 90 sp en 3 jours, c’est assez impressionnant, surtout sur une petite parcelle !
Le grébifoulque, je l’ai vu en Ouganda, par contre j’y ai raté le Martin-pêcheur géant !
Merci beaucoup – effectivement la Casamance est tres riche et vaut la peine d’etre exploree. En une semaine il doit etre possible de voir pres de 200 especes si on cible bien les sites a visiter, notamment en Basse-Casamance. Voir aussi p.ex. https://senegalwildlife.wordpress.com/2017/03/26/more-records-from-diembering-casamance/
Bonjour Bram, est-ce que c’était bien un couple de Martin-pêcheurs azurés (Shining-blue Kingfisher, Alcedo quadribrachys) ou alors un couple de Martin-pêcheurs huppés (Malachite Kingfisher, Alcedo cristata) ? Amicalement, John
Mea culpa! C’est bien le Martin-pecheur huppe, Malachite Kingfisher… je dois m’habituer encore aux noms francais! Merci John pour la correction.