Delta du Saloum: Palmarin, 19-21 août

Nouvelle escapade familiale à Palmarin le weekend dernier, ma troisième visite ici en l’espace d’un an, et comme lors des passages précédents le séjour a été fantastique.

Les points forts du weekend? Surtout cette femelle d’Hyène tachetée avec ses petits vus de (très) près lors d’une sortie crépusculaire dans la réserve communautaire, ou plutôt au retour de notre excursion (en calèche!) du site d’observation habituel dont nous pensions rentrer bredouille une fois de plus… Alors qu’il fait déjà bien nuit, on aperçoit d’abord la femelle alors qu’elle se trouvait dans une flaque (pour s’abreuver?), puis au moins deux jeunes âgés peut-être de quelques semaines seulement.

Aussi quelques volatiles bien sûr: pas moins de vingt-trois espèces de limicoles, Sternes caspiennes en pagaille, quelques centaines de Goélands d’Audouin et Barges à queue noire (dont comme toujours plusieurs individus bagués), des Flamants roses et nains, au moins 5 Canards à bosse, un couple de Gymnogènes en pleine parade, deux Pipits à dos uni, etc. etc. Si les passereaux paléarctiques ne sont pas encore arrivés à cette latitude, les espèces locales sont en pleine activité, en particulier les 4 espèces de tisserins présentes ici (gendarme, tête noire, vitellin, minule) mais aussi les Euplectes vorabés et franciscains arborant leur flashant plumage nuptial. Pour le reste, les désormais classiques Colombars waalia, Barbicans de Vieillot et aussi cette fois deux Barbicans barbus (quel beau pléonasme!), Irrisor moqueur, Martinets d’Ussher, et ainsi de suite.

Je vous présente ici quelques images (cliquer sur les photos pour agrandir), et comme d’habitude mes enregistrements sont déjà sur xeno-canto. Pour plus d’infos sur la zone, voir nos précédents articles sur ce blog (novembre 2015 et janvier 2016)

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Double-spurred Francolin / Francolin à doubles éperons

A commencer par ce délicat Francolin à doubles éperons, qui pour une fois n’était pas trop craintif et a bien voulu se laisser photographier. Ce francolin est très courant dans la zone, surtout semble-t-il à cette période lorsque des petits groupes traînent un peu partout dans les zones herbacées: peut-être des familles? Et très bruyant aussi… n’hésitant pas à émettre son chant rauque et urgent à tout moment de la journée.

 

Toujours sympa de voir les deux espèces de flamants côte à côte même si les deux groupes ne se mélangent visiblement pas: au centre de la photo les Flamants nains bien roses, à droite en arrière-plan les Flamants roses plus blanches (pas très logique tout ça je l’avoue!). Le devant de la scène est occupé par quelques Sternes caspiennes, une infime fraction du nombre total de caspiennes présentes dans la zone: au moins 1850 estimées le 21/8 dans les lagunes au nord de Ngalou! Et c’est sans compter les lagunes de Diakhanor et les environs de Djiffer un peu plus au sud sur la commune de Palmarin…

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Lesser & Greater Flamingo, Caspian Terns / Flamants nains et roses, Sternes caspiennes

 

Un couple de Rhynchées peintes dans une mare au bord de la piste de Samba Dia. Photo pas très nette car prise d’assez loin et avec une lumière pas terrible, mais on y voit bien le dimorphisme sexuel marqué et inversé par rapport à la plupart d’autres espèces d’oiseaux: la femelle très colorée à gauche, le mâle plus terne à droite. C’est ce dernier qui s’occupe de la progéniture, comme c’est le cas également chez les phalaropes par exemple. Il y avait ici deux couples, avec un 5e oiseau vu près du lodge en bordure des micro-salins.

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Greater Painted-Snipe / Rhynchee peinte

 

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Black-tailed Godwit / Barge a queue noire

Ci-contre, l’une des trois Barges à queue noire dont j’ai pu relever la combinaison de bagues couleur et pour laquelle Jos Hooijmeijer m’a comme toujours très rapidement fait parvenir l’historique de vie. Il s’agit de l’oiseau “Y4RRYB”, bagué en tant qu’adulte en mai 2009 à Waast, Friesland (Pays-Bas) où il a été vu pour la dernière fois le 29 juin dernier. Si cet oiseau a souvent été vu en Espagne et quelques fois au Portugal, c’est sa première “reprise” en Afrique de l’Ouest. La deuxième barge a au moins 15 ans puisqu’elle a été baguée en tant qu’adulte dans la même région, en 2004. Vue presque chaque année aux Pays-Bas, Khady Gueye l’avait déjà repérée à Palmarin en octobre 2014. La troisième est nouvelle: elle a été équipée de ses belles bagues couleurs en avril dernier par les chercheurs hollandais dans le Noord-Holland – donc pour une fois en dehors de son bastion de la Frise – et n’avait été contrôlée qu’une fois depuis, sur le lieu de capture le 5 juin. En tout, il devait y avoir au moins 450 à 500 barges dans la zone, mais comme pour la Sterne caspienne le chiffre réel devrait se situer bien plus haut que ça! Palmarin est d’ailleurs bien connu pour être un site d’escale d’importance majeure, surtout en automne. D’ici, la plupart des oiseaux continueront jusqu’en Casamance et en Guinée-Bissau pour y passer l’hiver.

Toujours dans le même registre, j’ai pu lire les bagues de plusieurs Goélands d’Audouin espagnols. Ici les bagues portent une combinaison de chiffres et/ou de lettres, donc moins faciles à relever que les bagues couleurs comme sur les barges et d’autres limicoles, surtout lorsque les oiseaux sont un peu loin ou qu’il y a du vent. L’appareil photo peut aider, permettant souvent de confirmer (ou de corriger!) ce qu’on pense lire sur le terrain, voire de déchiffrer après-coup à l’écran. Ci-dessous quelques exemplaires, dont deux portant des bagues (66P et BDCT). Comme toujours, il s’agit d’oiseaux espagnols.

 

Si vous vous demandez encore à quoi peuvent bien servir tous ces efforts de marquage d’oiseaux, je vous conseille de lire l’article Bar-tailed Godwits: migration & survival publié tout récemment sur l’excellent blog Wadertales. C’est un bel exemple de la manière dont les reprises de bagues peuvent aider à mieux comprendre le cycle de vie, le taux de survie, les stratégies migratoires et de façon plus générale l’écologie d’espèces en déclin, en prenant le cas concret de la Barge rousse, autre espèce fréquentant la zone de Palmarin.  Ce blog très informatif a d’ailleurs déjà fait état de nos chères Barges à queue noire, plus particulièrement l’oiseau anglais qui avait séjourné début janvier au Technopôle, puis vu 4 semaines plus tard sur une rizière portugaise. Chaque lecture de bague contribue donc potentiellement un petit peu à notre connaissance des oiseaux!

Ensuite, voici un oiseau bien plus discret mais pas pour autant moins intéressant: deux Pipits à dos uni vus le long de la piste de la déviation temporaire à Joal, photographiés lors de notre retour de Palmarin. Ce n’est que ma deuxième observation au Sénégal après celle d’un juvénile vu en novembre 2013 lors d’une sortie au Lac Tanma avec Paul Robinson, et ce dans une zone où l’espèce ne doit pas être très courante puisqu’elle ne figure pas sur ce carré d’atlas de notre petit Morel & Morel (Oiseaux de Sénégambie, 1990). La différence de coloration entre les deux individus, que j’ai pris pour des adultes (plumage un peu usé et non frais comme chez un juv., qui aurait le dos légèrement tacheté), était frappante: un oiseau très clair avec les parties inférieures et le sourcil presque blancs, l’autre plus sombre avec un fond de plumage tirant sur le beige.

A propos du sourcil, même si ce n’est pas un critère d’identification utile, le nom scientifique de ce pipit est Anthus leucophrys, du Grecque leucos (blanc) et ophrys (sourcil). Comme l’indique son nom français (et anglais: Plain-backed Pipit), c’est surtout le manteau et le dos uniformes, sans stries ou taches, qui permet d’exclure d’autres espèces ouest-africaines. Le dos est généralement couvert par les ailes, mais le manteau est toujours bien visible!

 

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West African Monitor / Varan ouest-africain (jeune)

Pour finir, ce tout jeune Varan ouest-africain qui a joué à cache-cache autour de notre bungalow. Ouest-africain? Eh oui, encore un “split” récent suite à une analyse génétique poussée qui a démontré que les varans de l’Afrique de l’Ouest sont suffisamment distincts de ceux du reste du continent, le Varan du Nil, pour en faire une espèce à part entière. Comme pour l’histoire de nos chacals qui sont en fait des loups africains, il s’agit là d’un cas de diversification cryptique décrit dans le détail dans cet article de Dowell et al. (2016) qui recommandent la reconnaissance des Varans d’Afrique de l’Ouest sous le nom de Varanus stellatus (Varan étoilé?). A l’opposé, le Varan orné V. ornatus est considéré comme synonyme du Varan du Nil et serait “seulement” un morphe phénotypique (disons une variante), dominante dans la zone forestière du continent.

 

 

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2 responses to “Delta du Saloum: Palmarin, 19-21 août”

  1. Stéphane Gardien says :

    Merci Bram. les voyages sont toujours extras… et pas chers!
    Mais un jour je viendrai!
    Steph

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